Cahier Technique (2)
Arme : Simple baston Vs Simple baston
Thème : Adaptation aux différentes distances dans le combat
Le texte est de Guro Sylvain Garcia et Master Dani Faynot.
Avec Guro Francois Guerrieri, 4 degré WADR & FFKDA, Instructeur ADRI & EWDojo
8 Exercices & Mise en Pratique
Voici une séquence d’exercices dont le but est d’apprendre à maitriser les distances dans le combat avec une approche dynamique pour dépasser le concept statique et souvent linéaire de la sacro-sainte distance. Le but est de gagner en liberté tout en augmentant le control.
Exercices de base:
1 – Afin de pourvoir jouer avec toutes les distances dans le combat, il convient en premier lieu d’isoler plusieurs distances et de clarifier les points clés qui permettent d’exploiter au mieux cette distance. Il s’agit de pratiquer et étudier des attaques et blocages sous tous les angles afin de bien intégrer ce qu’il est possible de faire ou non avec un maximum d’efficacité et un risque minimal. A ce stade, des « drills » peuvent être utiles pour développer les reflexes musculaires. C’est un travail de recherche avec un partenaire.
2 – Ensuite nous passons à la pratique en mouvement sur des attaques /défenses puis à l’étude des fondamentaux à corriger. Il s’agit d’une mise à l’épreuve en augmentant graduellement l’intensité et la vitesse des attaques. A ce stade on prend souvent des coups sur les doigts car il faut peaufiner les angles par rapports aux distances et au mouvement général et la lecture n’est pas toujours optimale.
3 – Lorsque tout est en place, il est temps d’incorporer plusieurs distances dans des phases d’attaque/défense libres. Deux puis trois distances différentes. Attention à ne pas aller trop vite. Au début, Il est possible d’annoncer la distance afin de faciliter le travail du partenaire.
4 – Le combat commence toujours à distance longue, c’est une réalité. Pour consolider l’apprentissage, vous pouvez commencer par une séquence qui va en se rapprochant : Larga, medio, medio-corto, corto. La pratique que nous visons à maitriser consiste à pouvoir enchainer un combat libre sous control. Chacun passant tour à tour de l’attaque à la défense. Il est primordial d’avoir un très bon control technique afin de ne pas blesser son partenaire d’entrainement trop souvent. La solution consiste à garder la tête froide (control émotionnel), les yeux ouverts (lecture) et adapter la vitesse et l’intensité de l’échange au niveau du plus faible des deux.
5 – Le niveau suivant c’est un échange totalement libre avec une recherche systématique des distances et des rythmes pour prendre le combat à son compte. On est encore dans la pratique, loin de la réalité du combat mais sur la bonne route. A ce stade il faut chercher à se rapprocher, s’éloigner en fonction des angles d’attaque et de défenses, des feintes et des ouvertures.
Pratique avancée:
En Doblete Rapilon, comme dans les autres systèmes traditionnels, nous combattons en utilisant des « bottes » ; des enchainements de combat qui ont été testés pour leur efficacité. Si l’étude d’une botte est classique et structurée, son application en combat est au contraire très libre. Nous allons graduellement intégrer ces bottes dans nos exercices de distances dans le combat. On commence sur une distance, puis on intègre les autres distances.
6. des bottes traditionnelles ou des variantes libres tout en restant au-delà de la distance de combat pour éviter les blessures et surtout emmagasiner des visualisations et des lectures successives dans le mouvement. Avec de l’expérience, ce « shadow boxing face à face » permet d’accumuler des expériences. Il est possible de sentir très vivement lorsque nous touchons ou lorsque nous somme touché… sans blessure, ce qui permet de multiplier la pratique. Primordiale de travailler dans toutes les directions, les hauteurs, les vitesses, les rythmes…
7. En restant sur une distance longue, se rapprocher à distance de canne pour intensifier la visualisation. Lorsque les trajectoires se rencontrent et que les cannes s’entrechoquent, nous sommes dans la bonne distance de pratique. Si vous vous éclater un doigt… vous étiez trop près.
8. Nous pouvons maintenant intégrer les bottes avec les autres distances. Nous pouvons commencer du plus loin au plus près, puis rentrer et ressortir et finalement en totale liberté… et total control.
A Chaque Distance Sa Vérité
Distance longue, Arnis de campo, larga mano (main longue)
Dans cette distance, les formes d’attaques prennent le pas sur les défenses car les coups sont complètement lâchés, bras déplié, vitesse maximale, avec un impact optimal qui utilise toute la longueur de l’arme plus la longueur du bras du combattant. En raison de l’espace entre les deux combattants, l’arme arrive à son point d’impact avec un maximum de puissance. La vitesse et la versatilité de la canne surpassent trop fortement la mobilité du défenseur et il est sage de s’en rappeler.
Dans ce cas de figure, il est strictement impossible de bloquer une attaque. En conséquence, pour ne pas perdre l’ascendant, reculer et donner l’avantage à l’adversaire, il faut soit laisser passer la frappe (retirado), soit faire une déflection ou une déviation qui ouvrira éventuellement l’espace pour un contre.
Distance moyenne (medio)
A cette distance, les deux protagonistes sont en position de frapper mais aussi de bloquer avant que l’arme ne prenne trop de puissance. La notion de blocage implique force, vitesse et timing. Afin de maitriser le choc du blocage il est nécessaire de bloquer dans des angles qui absorbent une partie de la violence du choc. Le rebond de l’arme devient dangereux pour la main du défenseur, donc chaque angle de blocage doit être étudié avec attention et réalisme. Il est possible de percuter la main adverse qui porte l’arme et qui devient la cible prioritaire systématique. En arnis traditionnel, un blocage n’est concevable QUE sur la main. C’est ici qu’interviennent les concepts « avec » et « contre », « avant – pendant-après ».
La main libre devient disponible pour enchainer un contre en se rapprochant. Il est parfois nécessaire de prendre de l’espace et frapper en s’éloignant. Il est encore possible de dévier une attaque. La main libre (bantay kamai) devient de plus plus active alors que l’on se rapproche de l’adversaire, aussi bien pour celui qui attaque que celui qui défend.
Medio-corto
La distance moyenne-courte (medio-corto) permet à la fois des blocages et des parades. Le mot « parade » en espagnol « parar » signifie « arrêter ». Dans une parade, notre arme vient s’interposer entre l’arme adverse et notre corps afin de nous préserver. La notion d’absorbation est primordiale pour une parade efficace et on l’obtient grâce à la qualité de main. La main libre doit intervenir sur chaque échange. Afin de trouver des espaces, il est faut travailler sur la rotation est les déplacements courts dans toutes les directions. Attention à ne pas donner trop d’appui à l’adversaire qui peut rebondir et enchainer plus rapidement des séries d’attaque.
La priorité reste d’attaquer la main porteuse de l’arme adverse afin d’éliminer la menace la plus grande. Notez que sur nos photographies l’assaillant conserve son arme, mais sur une frappe réelle, la main et/ou le poignet serait cassé et quoi qu’il en soit, l’arme ne resterait pas dans la main en raison de la violence du choc.
Sur les parades, l’arme vient toujours s’interposer entre l’arme adverse et notre corps. Il est important de bien se placer, très vite. La mobilité est fondamentale; toujours veiller à ne pas repousser l’arme adverse afin de ne pas lui redonner de latitude, ni d’énergie pour enchainer une série d’attaques. Il faut toujours inclure dans la parade une qualité d’absorption et ne pas donner la chance de rebondir sur votre défense.
Conseil: Si possible, essayez de vous placer derrière votre arme de parade plutôt que de positionner l’arme entre l’angle d’attaque et son corps. Vous augmentez ainsi l’efficacité de la parade et vous créez un angle de frappe pour contrer en un seul mouvement.
Distance courte (corto, serrada)
C’est le royaume des parades et des mouvements de poignet avec une main libre qui intervient sur chaque défense, chaque anticipation et chaque contre-attaque. C’est aussi l’espace que l’on doit créer et les frappes qu’on ne voit pas venir, les abaniko et de pluma. Les attaques sont moins puissantes donc il faut miser sur l’explosivité. Attention c’est une zone de danger pour les deux adversaires et il est sage de ne pas trop présumer et de manier confiance et humilité à bon escient. Comme en boxe, les sorties de distance courte donnent lieu à des KO surprenants.
Le corps à corps
Les épaules sont à portée l’une de l’autre. le corps à corps est souvent juste un instant, une demie seconde ou il faut prendre l’initiative ou sortir. Dans cet unique cas de figure, après avoir désarmé, il est possible de placer des clés, des étranglements, des pincements de doigt (ipit-ipit) et parfois des projections ou des amenées au sol très courtes. Surtout ne jamais engager quoi que ce soit avant de désarmer.
A vous de jouer,
Guro Sylvain & Punang Guro Dani